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Les tolérances orthographiques (1901, 1976 )

| 20 septembre 2019 | par Jean-Christophe Pellat

Entre règle et tolérance, où se situe la faute d'orthographe ?

La norme orthographique, qui n’accepte qu’une graphie possible, s’est imposée au XIXe siècle seulement. Avant, plusieurs graphies étaient possibles pour un même mot. Cependant, vu la complexité de l’orthographe française, on rencontre de nombreux cas où l’on peut douter, où la règle est noyée dans les subtilités et les exceptions. Pour limiter les dégâts aux examens, le ministère de l’Instruction publique a publié, le 26 février 1901, un « arrêté relatif à la simplification de l’enseignement de la syntaxe française » qui stipule que, dans les examens du ministère, « il ne sera pas compté de fautes aux candidats pour avoir usé des tolérances indiquées dans la liste annexée ». Celle-ci regroupe un très grand nombre de subtilités, les plus nombreuses concernant l’accord du participe passé. L’arrêté de 1901 étant peu connu, il a été remplacé et mis à jour par l’arrêté de « Tolérances grammaticales ou orthographiques » du 28 décembre 1976 pris par le ministre de l’Éducation, René Haby. La nouveauté la plus remarquée est la tolérance de l’accord au pluriel ou au féminin du participe passé avec le sujet on « lorsque celui-ci « désigne une femme ou plusieurs personnes : « on est restés bons amis ». Mais les tolérances ne suppriment pas la faute : celle-ci est pardonnée, mais elle reste une faute ; la règle n’est pas annulée, elle est seulement adoucie. On doit continuer d’écrire « on est resté ». Il faudra attendre les Rectifications de l’orthographe de 1990 pour qu’un changement de norme soit mis en œuvre : sur les points traités par les Rectifications, une nouvelle orthographe est proposée (et non imposée) aux usagers. Nous en reparlerons. 

Jean-Christophe Pellat
Jean-Christophe Pellat est professeur émérite de linguistique française à l’Université de Strasbourg, où il a enseigné en Licence, Master et dans les préparations au CAPES et aux agrégations de Lettres. Spécialiste de grammaire et orthographe françaises (histoire, description, didactique), il est co-auteur d’un ouvrage universitaire de référence, Grammaire méthodique du français (PUF, dernière éd. 2016) et de diverses grammaires scolaires. Dans ses travaux sur la didactique de la grammaire en FLE et FLM, il s’attache à l’adaptation des notions aux différents publics concernés.